vendredi 8 juin 2018

Collaboration et co-création : Tim NOBLE et Sue WEBSTER

Un article écrit par Olivia Galliano, élève de Terminale L1 spécialité Arts plastiques

Tim NOBLE et Sue WEBSTER



  





 Partenaires dans la vie comme dans leur art, les sculpteurs Tim Noble et Sue Webster sont devenus très rapidement célèbres pour leur "trash sculptures" (sculptures à base de déchets), entre sculpture contemporaine et culture punk. Timothy Noble est né en 1962 et Susan Webster en 1967 ; originaires  tous les deux d’Angleterre, ils se sont rencontrés en 1996 à la Nottingham Polytechnic fine arts school. Ils travaillent alors dans un même atelier lorsqu’ils décident de commencer à travailler ensemble. Ils sont  aujourd’hui indépendants, bien qu'ayant un site internet commun présentant leurs réalisations ; ils travaillent à Londres. 

Ces deux artistes entrent parfaitement dans leur génération, ils usent de provocations et de violences , à travers la poésie et l' «  l’instabilité de l’ombre ». Les messages qu’ils cherchent à faire passer à travers leurs œuvres sont indissociables des matériaux utilisés.
Ils marquent les esprits grâce à leurs célèbres projections de silhouettes hyperréalistes, qui créent une opposition forte avec le tas de matériaux et objets dont elles sont issues
Nous pouvons voir cette opposition dans leur oeuvre « Wasted Youth » (jeunesse gâchée) , effectuée en 2000.




Cette  œuvre est constituée de détritus, d'emballages de marques de fast-food. Elle mesure 210x134x66cm. Cet installation consiste à éclairer le « tas » de détritus qui se situe au premier plan, grâce à un projecteur , qui reflétera alors sur un mur une ombre. Cette ombre dessiné une femme de profil couché sur le dos, et d’un homme dans la même position mais reposant sur elle.
L’éclairage du projecteur est si forte qu’on voit tres clairement la masse de détritus, on ne s’attend pas alors à ce qu’une ombre si nette sois projeté sur le mur. Le projecteur lui est hors cadre, on ne sait donc pas d’ou vient cette lumière. Il y a alors un gros contraste entre les couleurs vives des détritus, le noir du sol, l’ombre, et la lumière blanche du mur.
On se rend compte alors que c’est la sculpture de déchets qui construit l’ombre. Un contraste est encore présent, dans la compréhension de l’oeuvre au premier abord. Le spectateur est troublé par la masse de déchets si répugnant, mais calmé par la paix de ce couple tendrement surpris dans un moment de rêverie.
Dans l’étude de l’œuvre nous nous rendons compte que les deux personnages dans l’ombre sont les deux artistes eux mêmes ! Comme ils le disent dans la description de leur sculpture : «Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es.... Le titre souligne lui la décadence et la vanité d’une jeunesse aveuglée, se forgeant son identité dans sa consommation; une identité fragile, fragile comme l’ombre est fugace… » .

jeudi 7 juin 2018

Collaboration et co-création : Sophie TAEUBER-ARP et Jean ARP

Un article écrit par Léa JOURDET, Terminale L1 Arts plastiques spécialité, lycée Renoir.




Jean ARP ou Hans ARP, né de père allemand et de mère alsacienne à Strasbourg en 1886, est mort en 1966 à Bâle.
Il étudie les arts décoratifs à Strasbourg, Paris et Weimar, avant de se consacrer à la poésie. Il adhère un instant au club artistique Das jüngste Elsaß qui veut promouvoir une version rénovée de la culture alsacienne et germanique. Il fait aussi la connaissance de Paul KLEE en 1909. IL participe à des expositions, dont celle du Blaue Reiter en 1912. IL s'associe en 1916, à Zurich puis Cologne, à la fondation du mouvement Dada. Il commence à sculpter (bois découpés et peints) en 1917. Proche des surréalistes de 1926 à 1930, il deviendra membre fondateur du groupe Abstraction-Création.

Sophie TAEUBER-ARP est née en 1889 à Davos (Suisse), et décède en 1943 à Munich, à 53 ans.
L’Atelier de Jean Arp et de Sophie Taeuber a la singularité d’abriter les travaux d’un exceptionnel couple d’artistes. Le couple se lance à corps perdu dans la recherche artistique expérimentale et produit d’immenses œuvres abstraites à quatre mains.
    Jean Arp a dit à propos de son épouse et des spécificités de son art : « La sérénité de l’œuvre de Sophie Taeuber est difficilement accessible à ceux qui sont dépourvus d’âme et qui vivent dans la confusion. Parfois on a qualifié ses œuvres d’art appliqué. La bêtise autant que la méchanceté sont à l’origine de cette appellation. L’art peut aussi bien s’exprimer au moyen de la laine, du papier, de l’ivoire, de la céramique, du verre que par la peinture, la pierre, le bois, l’argile. Un vitrail gothique, un tissu copte, la broderie de Bayeux, une amphore grecque ne ressortissent pas à l’art décoratif. Je connais des objets sculptés par des paysans qui ont une réalité plastique vivante, aussi haute que celle d’un torse antique. L’art est toujours libre et libère l’objet auquel il s’applique ».(In « Jalons » 1950, Jours Effeuillés, Gallimard, 1966)
    Sophie Taeuber-Arp apprend à tisser, à dessiner des motifs, elle prévoit d'être dessinatrice textile et devient d'abord enseignante. Elle va associer le savoir artisanal au domaine des arts plastiques. Il s'agit de penser avec les mains au lieu de partir d'un concept pour créer. Son œuvre très diverse est marquée par la géométrie et le rythme, embrasse des formats à deux dimensions (tableaux, travaux sur tissu), à trois dimensions (sculpture, reliefs) et le spectacle vivant (danse, théâtre).
     Elle a sans cesse reproduit les mêmes motifs abstraits, et cela au travers de tous les médiums utilisés : dessin (gouache préalable), broderie, tapisserie, peinture, vitrail, volume (petit objet, bijou, jouet, marionnette, Tête Dada, meuble, relief), décor mural, architecture, avec la volonté de rompre la hiérarchie des arts, d’œuvrer en collectif et d'intégrer l'abstraction dans la vie quotidienne.
Si le rectangle et le carré prédominent, accompagnés du triangle (Compositions verticales-horizontales, 1915-1930), la courbe et le cercle apparaissent dès les premières années (1915-1920) pour s'imposer dans les dernières années de son oeuvre (années 1930 et 1940). La proximité, la collaboration et le travail en duo avec Jean Arp (abstraction organique, reliefs en bois peint) ont d'ailleurs entraîné une influence réciproque. 
  
Sophie Taeuber-Arp (1889 - 1943)
Tête dada
1918 - 1919
Bois tourné et peint
34 x 20 x 20 cm
  
Hans ARP : "relief concret" , assemblage de vois peint, 1916-23

    Jean Arp est peintre, sculpteur et poète, cofondateur du mouvement dada, puis proche du surréalisme. Il a exercé une forte influence sur de nombreux artistes parmi lesquels, Tristan Tzara, Marcel Duchamp, Picasso ou Mondrian…Anticonformiste et contre l’art traditionnel, il voulait créer de « nouvelles apparences », tout en prenant la nature pour modèle.   
    Dès les années 1916, années des premiers reliefs Dada, il s'inspire des "lois du hasard", bannissant la volonté dans la composition. Il est guidé par deux impératifs : l'art doit être concret et emprunter les processus spontanés et paisibles de la nature comme sujet. La réunion des deux donnera naissance aux "Formes terrestres", reliefs, dessins, gravures, renvoyant à une nature signifiante dont la logique n'est pas celle de l'homme et qui devient le principe conducteur de toute son œuvre.   
    
     En 1916 le couple réalise son premier collage commun, puis de nombreuses œuvres en duo avec la volonté affichée de créer une unité qui empêche de distinguer qui a fait quoi. Les deux artistes ont réalisé des collages, des sculptures, des dessins.

Sophie TAEUBER-ARP et Hans ARP : "duo collage", 1918

 ILs ont aussi travaillé tous les deux avec Théo van Doesburg pour décorer  L'Aubette, 1926-1928, à Strasbourg. Il s'agissait d'installer un vaste complexe où s'imbriqueraient restauration et loisirs, avec une dizaine de salles comprenant notamment un bar américain, un caveau-dancing, un restaurant, une salle de billard, un ciné-bal, une salle des fêtes et un foyer-bar. Ils ont mis en pratique les théories du mouvement néerlandais De Stijl (esthétique néoplastique: emploi de formes géométriques abstraites, agencement des couleurs primaires et des non-couleurs et grille orthogonale stricte), alors en vogue en Europe, sur la conception de l'espace et de la décoration.
      

      
     Lorsque Sophie Taeuber meurt accidentellement en 1943, Jean Arp peine à faire le deuil de sa femme et il dédiera à sa partenaire plusieurs œuvres littéraires et artistiques à titre posthume.
   
 On peut s'intéresser à une œuvre de Jean Arp exposée au musée des Beaux-Arts de Berne ; il s'agit d'un "duo-peinture" de 1948 (cinq ans après la mort de sa femme), d'après un dessin issu de vingt travaux communs entre les deux époux réalisés en 1939, qui représentent un ensemble de lignes claires et simples dans lesquelles les formes organiques de Jean Arp se mélangent aux constructions géométriques de Sophie Taeuber-Arp pour former un langage visuel commun.

Hans ARP : "Duo-peinture", huile sur toile, 1948

 Ici l'opposition entre les deux styles est bien visible. La forme claire et fermée sur elle-même porte la touche de Jean Arp tandis que les six rectangles transparents qui l'entourent et la percent en son centre sont typiques de Sophie Taeuber-Arp. Le contraste des formes dans le tableau est en plus accentué par les tons clairs et pleins. On peut interpréter la forme organique blanche comme une silhouette flottante en fusion et on peut ainsi y voir une image de la relation qui liait les deux artistes.

       
     Les deux artistes ont aussi réalisé ensemble des sculptures en bois, comme "sculpture conjugale" (. Volontairement le couple voulait créer une unité qui empêche de distinguer qui fait quoi dans l'œuvre. Cette sculpture semble binaire, masculin et féminin, sans haut ni bas distinct.





  

Collaboration et co-création : Christo et Jeanne-Claude

Un article de Floriane DARRAS, élève de TL Arts plastiques, lycée Renoir

CHRISTO et Jeanne-Claude

 
Jeanne-Claude (à gauche) et Christo (à droite)



Christo : Christo Vladimiroff Javacheff, né le 13/06/35 en Bulgarie
Jeanne-Claude : Jeanne-Claude Denat de Guillebon, née le 13/06/1935 au Maroc et morte le 18/11/2009 à New York.

Christo et Jeanne-Claude seraient nés le même jour à la même heure, un hasard ou le destin?
D’un côté, il y à Christo ; qui a passé 3 ans aux Beaux-Arts de Sophia (de 19583 à 1956) où il étudiera la peinture, la sculpture ainsi que l’architecture. Il défiait le système en peignant des toiles allant à l’encontre des idéologies, ce qui lui à valu de nombreux problèmes avec le Réalisme Socialiste. Il s’exile à Venise en 1956 avant d’aller sur Paris deux ans plus tard. Il se fait de l’argent en vendant des portraits à l’huile signés au nom de « Javacheff ». C’est en livrant le portrait de l’épouse du général Jacques de Guillebon, directeur de l’Ecole polytechnique, qu’il va rencontrer leur fille, ainsi que sa future épouse, Jeanne-Claude.

De l’autre Jeanne-Claude ; une jeune française qualifiée de « rousse flamboyante comme empaquetée d’un film plastique » par Christo lui-même !
 

Christo est plutôt l'artiste, et Jeanne-Claude l'organisatrice. Les réalisations destinées à l'extérieur sont signées par Christo et Jeanne-Claude, les dessins par Christo. Après avoir émigré aux États-Unis en 1964 et s'être installés à New York, ils commencent à réaliser des projets de grande envergure, intervenant de façon directe et éphémère sur des édifices, des monuments ou des paysages entiers.

Le couple tenant l'un des premiers emballages ; "Wrpped shoe", Rome, 1963.
 
Jeanne-Claude et Christo devant "Green store front", sculpture environnement, de 1964. Jeanne-Claude est muse et assistante de Christo.



« The Umbrellas » (1984-91) :

Cette œuvre d'art temporaire Japon-États-Unis reflète les similitudes et les différences dans les modes de vie et l'utilisation de la terre dans deux vallées intérieures, l'une de 19 kilomètres et l'autre de 29 kilomètres.
Le 4 octobre, des étudiants, des travailleurs agricoles et des amis, 960 aux États-Unis et 920 au Japon, se sont joints au marché du travail pour achever l'installation des Umbrellas. Chaque parapluie mesure 6m de haut et 8,66m de diamètre.
Cinq jours plus tard, 1 880 travailleurs ouvrent les 3 100 parapluies au Japon et en Californie
Onze fabricants ont préparé les différents éléments des parapluies: tissu, superstructure en aluminium, bases en acier, ancrages, supports de base en bois, sacs et couvercles moulés ; ils se situent au Japon, aux États-Unis, en Allemagne et au Canada. Les 3 100 parapluies ont été assemblés en Californie, d'où 1 340 parapluies bleus ont été expédiés au Japon.


Cette œuvre qui est d'une valeur de 26 millions de dollars, a été entièrement financée par les artistes car ils n'acceptent pas le parrainage. Comme tous leurs projets précédents, Christo et Jeanne-Claude ont été financés par la vente des études, des dessins préparatoires, des collages, des maquettes ou encore lithographies originales : c'est en général la tâche dont Jeanne-Claude s'occupe avec le plus de succès : elle contacte et rencontre galeristes, clients, amis, afin de présenter puis vendre le projet avant (et après !) qu'il ait été réalisé.



 
Au Japon, les parapluies étaient positionnés rapprochés, de façon à suivre la géométrie des rizières. Afin de rappeler la végétation luxuriante enrichie par l'eau toute l'année, les parapluies étaient de couleur bleus.
En Californie, la configuration des parapluies était fantaisiste et s'étendait dans toutes les directions. Dans un paysage sec les parapluies étaient jaunes.
A partir du 9 octobre 1991 et pendant une période de dix-huit jours, les parapluies ont été vus, approchés et appréciés par le public, que ce soit en voiture, depuis la route au loin ou de plus près en marchant en dessous.

 

lundi 4 juin 2018

COUPLES d'ARTISTES au centre Pompidou Metz : l'amour à l'œuvre



 
Edward WESTON : "faux mariage de Tina et Edward" (1924)

André BRETON a un jour affirmé que le but ultime de l'art était sa concrétisation par l'amour : la multitude de duos d'artistes exposés actuellement (et jusqu'au 20 août prochain) au centre Pompidou-Metz semble lui donner raison. Le parcours de « Couples modernes 1900-1950 », réunit ces amants ou époux aux destins souvent hors-normes et révèle la richesse de ces créations croisées, dans les domaines de la peinture, de la photographie, de la sculpture, de la musique, de la littérature, des arts appliqués.


L'exposition est conçue autour de couples d'artistes, hétéro ou homosexuels, exerçant ou pas la même discipline, et s'enrichissant toujours de la rencontre (fusion ?), de l'opposition de deux personnalités : Tina Modotti & Edward Weston, quand ils s'embarquent pour le Mexique en 1923, ont explicitement conclu un contrat : il lui apprendra la photographie, elle gèrera le studio, les développements et les ventes. Quand le couple bat de l'aile, en 1926, Tina est devenue une grande photographe, qui veut désormais mettre son art au service de la lutte des classes. Weston, lui, reparti aux USA, photographie alors ses plus belles images (fruits, animaux). 

Georgia O'Keeffe (peintre) et Alfred Stieglitz (chantre de la "straight photography") se rencontrent autour d'une conception épurée, presque symbolique du réel : elle, à travers ses agrandissements de fleurs aux formes très suggestives, lui, dans ses cadrages serrés d'un New-York réduit à un réseau de formes, ou à travers les nus de Georgia, ou encore dans ses "équivalents" (des nuages et leurs formes, rien d'autre). Des productions singulières mais une même direction donnée au travail et à l'innovation.

 
Georgia O'KEEFFE : "musique, rose et bleu", huile sur toile, 1918

Alfred STIEGLITZ : "dancing trees", 1921

Pour de plus amples renseignements, voir le lien ci-dessous

Et ici une vidéo présentant l'exposition à travers quelques exemples de relations "créatives".